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Malaassot - le blog de mordehai              -           ! ברוך הבא

Avec les jeunes des collines

22 Décembre 2011 , Rédigé par mordeh'ai Publié dans #Société

 Par Serge Golan,

http://www.hamodia.fr/


Ils partent à la conquête des collines de Judée-Samarie, ne craignant ni les Arabes, ni des conditions de vie très rustiques. Les jeunes des collines se considèrent comme des pionniers. Mais la politique du « tag me’hir » (le prix à payer) que certains font payer aux Palestiniens ou à l’armée, provoque l’inquiétude des autorités israéliennes. Hamodia est allé à leur rencontre.

Avant de devenir roi d’Israël, le jeune David menait son troupeau sur ses mêmes collines rocailleuses battues par le vent. Le récit biblique suffit à Eytan Ben Zeev, 19 ans : c’est son cadastre et sa feuille de route. « L’Éternel a promis cette terre à Abraham et sa descendance. Et ça personne n’y peut rien. Même le pire de nos ennemis… », explique le berger occupé à soigner ses moutons. Jusqu’à présent, dans le monde de Eytan, les choses étaient claires et les ennemis bien identifiés : la communauté internationale qui conteste la présence juive en Judée-Samarie et les habitants des villages palestiniens de la vallée de Shilo où il vit. Un voisinage marqué par la menace terroriste et émaillée d’échanges de coups sur fond entre bergers pour un pâturage contesté.
Mais depuis que la police a débarqué en pleine nuit pour l’expulser, lui et sa femme, de leur maison construite sur une colline isolée à proximité de l’avant-poste d’Esh Kosesh, Eytan Ben Zeev s’interroge. Obstiné, il avait alors rebâti sa maison, pour, quelques semaines plus tard, la voir raser à nouveau. Aujourd’hui, Eytan ne range plus l’État d’Israël et ses représentants parmi ses amis. Mais de là à les considérer comme des ennemis ?
La question s’est posée la semaine dernière avec une acuité nouvelle après les échauffourées qui ont opposé jeunes juifs des collines et militaires israéliens à Ramat Guilad, un avant poste de Samarie. Dans la nuit de lundi à mardi des centaines de jeunes gens s’étaient rassemblés là, pour empêcher la destruction annoncée d’habitations construites sans permis. Et lorsque plusieurs véhicules d’un convoi mixte armée-police sont arrivés sur place, la situation a dégénéré. Certains jeunes ont lancé des pierres et l’un d’eux s’est même approché de la jeep du commandant de la région militaire d’Éphraïm, le colonel Ran Kahana, il a ouvert la portière et lancé un bloc sur l’officier le blessant légèrement. La scène s’est d’ailleurs reproduite peu après avec la jeep du commandant en second de la région, le lieutenant-colonel Tzour Herpaz qui est petit-fils de rescapé de la Shoah et qui s’est fait traiter de nazi par son agresseur juif. Parallèlement une vingtaine de jeunes ont pris d’assaut la base de la région d’Éphraïm, brûlant des pneus et lançant de la peinture. Et le lendemain, deux mosquées désaffectées étaient vandalisées et sur leurs murs on pouvait retrouver l’inscription « Tag Mé’hir ».
Ces incidents ont provoqué une émotion considérable en Israël, plaçant les « jeunes des collines » sous le feu des projecteurs. S’en prendre physiquement à un officier de Tsahal, représente en effet, pour la majorité de la société israélienne, le franchissement d’une ligne rouge. Les condamnations ont été très vives, allant des rabbins de Judée-Samarie rappelant l’interdiction de lever la main sur l’armée, à l’ancien ministre travailliste Fouad Ben Éliézer, regrettant publiquement que les militaires « n’aient pas ouvert le feu » sur les manifestants juifs. Jusqu’au Premier ministre qui a prononcé des mots très durs : « Nous ne laisserons pas les émeutiers attiser une guerre de religion avec nos voisins. Nous ne les laisserons pas profaner des mosquées, nous ne les laisserons attenter ni aux Juifs ni aux Arabes. Nous les arrêterons, nous les éloignerons et nous les jugerons. Il n'y aura ni remises ni allègements. La loi est la loi. La justice c'est la justice. L'atteinte à des soldats de Tsahal est des plus graves ».

La politique du « tag me’hir »
Mais l’inquiétude des autorités israéliennes face à la violence d’une partie radicale des jeunes militants des implantations de Judée-Samarie ne date pas des incidents de Ramat Guilad. Depuis quelques mois, une vague de vandalisme frappe en effet Israël, des deux côtés de la Ligne verte. Destinées à répondre aux destructions d’avant-postes illégaux, ces violences font partie de la politique du tag mé’hir (le « prix à payer »), un slogan dont leurs auteurs signent systématiquement leurs actions. Elles visent principalement les mosquées, mais les Juifs ne sont pas épargnés. Les dirigeants des mouvements d’extrême gauche comme Chalom A’hchav sont ainsi régulièrement menacés et les officiers coupables d’avoir dirigé des évacuations sont harcelés jusque devant leur maison.
Les jeunes des collines ne sont pourtant pas nombreux - une centaine d’activistes très violents et un gros millier de sympathisants, auxquels viennent s’agréger des adolescents venus de tout le pays lorsqu’il s’agit de manifester. Mais en mobilisant les autorités, ils ont atteint leur objectif : les convaincre que chaque attentat anti-israélien, chaque destruction de maison juive en Judée-Samarie, entraînera des représailles contre les Palestiniens et des échauffourées avec l’armée.
Alex Ovstroski était l’une des figures charismatiques du mouvement des jeunes des collines : « Tout est question de rapport de force et pour l’instant. Si pour éliminer un terroriste potentiel, il faut buter 10 000 Arabes, je suis prêt. Si pour empêcher une évacuation, il faut faire passer un sale quart d’heure à des soldats », nous expliquait-il lorsque nous l’avions rencontré chez lui, à Éli. Depuis, Alex dort en prison, arrêté par le Shin-Beth qui l’accuse de s’être introduit en septembre dans une base militaire de Binyamin pour la vandaliser. Il est vrai que ce laïc monté en Israël à l’âge de cinq ans de Biélorussie, était tout en haut de la liste des suspects : les services de sécurité l’avaient déjà interpelé à de nombreuses reprises pour sa participation présumée à des descentes musclées dans des villages arabes, des arrachages d’oliviers ou des jets de pierre sur des voitures palestiniennes. « Nos adversaires doivent être convaincus que la vie et la tranquillité d’un Juif valent cher. S’ils s’y opposent, ils en paieront le prix », disait-il encore.

Le traumatisme du Goush Katif
Dans un récent rapport interne, le Shin-Beth s’inquiétait d’une possible dérive terroriste des jeunes des collines. Un amalgame refusé, cette semaine, par Binyamin Nétanyaou qui a repoussé les demandes de les qualifier de groupe terroriste, et aurait permis d’appliquer contre eux des mesures policières et judiciaires d’exception. Il est vrai que, malgré leur provocation, ces jeunes n’ont jamais tenté d’attenter à une vie humaine, juive ou arabe.
Reste qu’une partie de ces jeunes Juifs radicaux semble désormais incontrôlable, rejetant les appels au calme des rabbins et des représentants des habitants juifs qu’ils considèrent comme des « collabos ». Pour compliquer la chose, cette jeunesse qui a grandi dans les colonies classiques ne rentre dans aucune catégorie connue. Aux hippies, ils ont cependant emprunté le retour à la nature, le rejet du confort bourgeois et du consumérisme. Quant à cette volonté de ne pas céder un pouce de terrain, elle remonte au démantèlement du Goush Katif, en août 2005 et au choix de ses habitants de ne pas s’opposer par la force à la décision d’Ariel Sharon. Le traumatisme est encore à vif, mais la leçon a été retenue : face au gouvernement de Jérusalem, la résignation ne paie pas.

« La majorité d’entre eux avaient une petite dizaine d’années lors de l’expulsion du Goush. Ils sont donc entrés dans l’adolescence avec ce traumatisme : des Juifs étaient sortis de force de leur maison par des soldats de Tsahal », explique Akiva Novick, journaliste au Yédiot A'haronot. Lui-même élevé dans l’implantation d’Ofra, ce reporter à peine plus âgé qu’eux note une « dérive » chez ces jeunes radicaux. Elle est religieuse. « Dans leur immense majorité, ils n’étudient pas et ont quitté très tôt la yéchiva. Ils justifient leurs actions par la Torah, mais en invoquant sans cesse Eretz Israël, ils oublient totalement la ahavat Israël, l’amour du prochain ».
Mais se focaliser sur la partie de la faction la plus violente des jeunes des collines, c’est passer à côté d’une réalité : leur idéologie est inébranlable. C’est elle qui leur permet d’affronter les rigueurs de l’hiver dans les collines de Samarie, sans eaux et sans électricité, sous la menace constante de voir la police détruire leurs fragiles abris.

 

« Nous peuplons la terre d’Israël », rappelle Téhila, une jeune fille du « garin » de Ramat Migron. « À chaque étape du retour du peuple juif chez lui, les pionniers sont traités d’extrémistes. Et puis on s’aperçoit qu’ils avaient raison d’insister. Vous verrez : la prochaine génération ira encore plus loin ». Si la poignée d’Amants de Sion qui en 1882 avaient fondé Richon Lé-Tsion, la première implantation juive en Palestine, pouvaient répondre à Téhila, que diraient-ils ?

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