Olmert, analyse d'un fiasco
Nul ne peut savoir quelle aurait été la situation actuelle du pays si Ariel Sharon était encore aux commandes aujourd'hui. Par contre, tout le monde peut se
rendre compte dans quel état est Israël après deux années de mandat d'Ehoud Olmert, avec Kadima comme soutien!
Le processus de départ du Premier ministre a été définitivement enclenché ce dimanche depuis qu'il a annoncé au Conseil des ministres qu'il transmettrait sa lettre de démission au Président
de l'Etat Shimon Pérès, ce qu’il a fait le même soir.
Certes, Olmert ne quittera pas tout de suite ses fonctions, mais il est déjà possible de dresser un bilan de ces deux années sous sa magistrature, entamée au son du clairon avec la création
de Kadima, "espoir de la politique" israélienne…
Force est de constater que dans pratiquement tous les domaines, le « bi-ennat et demi » d'Olmert sera à inscrire parmi les échecs les plus patents d'un Premier ministre israélien. Celui qui
fut l'étoile montante de la politique israélienne lorsqu'il était maire de Jérusalem, sera devenu le chef de gouvernement le plus corrompu, le plus retors, le plus honni, le plus inapte - et
peut-être le plus arrogant aussi - que le pays aura connu en 60 ans d'existence. Ce verdict semble sévère mais la situation intérieure et extérieure dans laquelle se trouve Israël ne permet
pas le doute.
Je concentrerai l'analyse dans trois domaines: celui des choix politiques, celui des normes éthiques et celui du comportement personnel.
Les choix politiques d'Ehoud Olmert ont amené l'Etat d'Israël dans une situation extrêmement difficile sur le plan extérieur, et plongé la société israélienne dans des divisions et des
interrogations profondes. Il y a des points communs qui relient la Deuxième Guerre du Liban, la situation au sud du pays, les dossiers israélo-palestinien et israélo-syrien concernant le
fonctionnement du Premier ministre (enfin) démissionnaire :hésitations lorsqu'il faudrait agir et précipitation lorsqu'il serait judicieux d'être prudent.
La commission Winograd a suffisamment détaillé les défaillances du Premier ministre dans sa manière d'apprécier les situations et prendre les décisions en fonction. L'une des conséquences les
plus fâcheuses de ce conflit aura été le changement total de l'image et de la place stratégiques d'Israël dans la constellation moyen-orientale. Les Américains l'ont constaté avec déception,
le Hezbollah le répète à l’envi avec délectation. Et les déclarations d'auto-satisfaction d'Olmert sur "le calme qui règne à la frontière nord" ne convainquent personne. La manière dont les
Hamas et le Hezbollah ont dirigé ou dirigent encore les négociations pour la libération de prisonnier israéliens, sont l'exemple le plus frappant de la manière dont Israël est aujourd'hui
perçu et considéré par les groupes terroristes: un tigre de papier. Beaucoup d’art oratoire et de menaces, très peu d’actes sur le terrain. L’inverse d’il a quarante ans.
Concernant le volet palestinien, Olmert aura montré infiniment plus de précipitation à faire des concessions envers les Palestiniens, et pour plomber machiavéliquement les gouvernements
futurs, que pour mater le terrorisme du Hamas conséquent à la Hitnatkout du Goush Katif. Jamais sous aucun gouvernement israélien, on ne sera allé si loin dans la générosité envers les
exigences palestiniennes, les déclarations de « bonnes intentions » en direction de nos ennemis et d’abandons des idéaux sionistes. Et que l'on ne vienne pas dire "qu'il ne s'agit là que de
propositions et non d'actes concrets", car dans la mentalité arabe, les promesses valent signature (dans un sens seulement, évidemment), et les illusions déçues amènent la violence.
Sur le plan syrien également, Olmert aura, pour des raisons qui n'ont rien à voir avec la géopolitique, entamé un processus dangereux avec le pays dont la frontière avec Israël est la plus
calme depuis 40 ans.
Sur le plan intérieur, ces démarches ont abouti à une incertitude quant à leur avenir de dizaines de milliers de familles israéliennes, qui habitent dans le Néguev occidental, depuis Sderot
jusqu'à Ashkelon, à la frontière nord du pays, sur le plateau du Golan et dans les localités de Judée-Samarie qui se trouvent à l'Est de la barrière de Séparation. On pourrait même y inclure
les habitants juifs des quartiers de Jérusalem jouxtant les quartiers arabes qui risquent de se retrouver un jour dans la situation de Sderot et environs!
Le mandat d'Ehoud Olmert aura aussi été marqué par des crises intérieures retentissantes sur le plan intérieur: celle de l'Education, celle de la Justice et de la Police, et celle du scandale
innommable des conditions de vie des rescapés de la Shoa.
Le deuxième échec retentissant d'Ehoud Olmert est lié à l'effondrement des normes d'éthique politique. Certes, l'assaut contre la démocratie et la probité politique n'est pas né il y a deux
ans. La manière dont Itsh'ak Rabin et Ariel Sharon ont imposé au forceps les Accords d'Oslo et la Hitnatkout restera dans les annales du cynisme politique. Mais pour la première fois, un
homme politique aura autant été à ce point éclaboussé par des affaires et des scandales liés à l'argent et au trafic d'influence. Le court mandat d'Ehoud Olmert aura été parsemé de combines,
copinages, stratagèmes dans lu but unique de se cramponner au pouvoir.
En quelques années, la confiance de la population en ses institutions démocratiques et sa classe politique aura subi une chute vertigineuse. La Knesset, la Cour Suprême, la Police, l'armée
autant de bastions de la "cohésion et de la robustesse nationales" qui auront été égratignés au bas mot par la manière d'exercer le pouvoir d'un avocat ambitieux et sans scrupules devenu
Premier ministre.
Enfin, c'est sur le plan de l'attitude personnelle qu'Ehoud Olmert aura été un bien piètre exemple. Durant ces deux années, nous aurons assisté à des fleurons d'arrogance, de suffisance, de
mépris affiché envers certaines parties de la population, d'une indifférence désinvolte envers les clameurs de la population, des recommandations des organes de contrôle ou des conclusions de
commission d'enquête, enfin, de promesses et d'engagements personnels clamés de manière théâtrale mais non tenus.
Que de chemin parcouru pour cet homme élevé dans la tradition de Zeev Jabotinsky, membre du Betar et protégé d'Itshak Shamir, et qui aujourd'hui est capable d'appeler "mon ami" le
négationniste et chef terroriste Abou Mazen, de lui faire sans cesse des cadeaux sous forme de libérations d'assassins, et simultanément de crier au "pogrom", quand des Juifs viennent
exprimer leur exaspération face la tentative d'assassiner un enfant de neuf ans.
Ehoud Olmert, on ne vous regrettera pas,
Et puisse Kadima, repaire d'opportunistes, suivre vos pas.
Vous vous prétendiez "indestructible", un jour dans l'Express,
Aujourd'hui, votre orgueil n'a d'égal que notre allégresse.
Il n'y aura eu qu'un seul point positif au passage d'Ehoud Olmert à la tête du gouvernement: comme le dit Tevié le laitier : "Comme cela ne peut être pire, cela ne pourra maintenant qu'aller
mieux!"
Chana tova!