Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Malaassot - le blog de mordehai              -           ! ברוך הבא

Sabîl * et la paix de Jérusalem

21 Juin 2011 , Rédigé par mordeh'ai Publié dans #Point de vue

Jean-Daniel Chevalier

© Primo, 21-06-2011

http://www.primo-info.eu/

 

* L’organisation chrétienne arabe palestinienne Sabîl (ou Sabeel), soutenue par des chrétiens de pays occidentaux, entre autres en France, est engagée dans un combat pour la cause palestinienne.

Elle développe une théologie de la libération proche-orientale et une idéologie anti-israélienne avec une rhétorique antisioniste radicale.

Derrière ses appels à la paix et à la justice, le discours est des plus manichéen, avec le mal d’un côté (l’État d’Israël) et les victimes innocentes de l’autre (les Arabes palestiniens).

Dernièrement, Sabîl, s’appuyant sur une Semaine de prière pour la paix de Jérusalem organisée par le COE (29 mai – 4 juin), a produit un texte qui une fois de plus, montre un militantisme anti-israélien peu propice à la paix, notamment de Jérusalem.

Le texte précise: « Sur le plan religieux, Jérusalem a une égale importance pour les trois religions.. ». Cette affirmation n’est pas recevable pour la plupart des Juifs.

Affirmer cela, c’est ignorer l’histoire de cette ville et sa place dans l’islam.

Affirmer cela, c’est poser une bien mauvaise base pour d’éventuelles futures négociations sur Jérusalem.

Toute l’histoire de Jérusalem depuis l’Egire montre que l’intérêt politico-religieux qu’y porte l’islam est totalement corrélé à l’intérêt politico-religieux qu’y portent les chrétiens ou les juifs.

Quand ces derniers s’y intéressent religieusement et/ou politiquement, avec des revendications, l’islam s’y intéresse aussi.

Quand la domination de l’islam est tranquille, sans revendication et sans « rivalité » chrétienne ou juive, Jérusalem présente un bien faible intérêt pour l’islam.

L’histoire montre que Jérusalem est un « outil » pour l’islam pour affirmer sa suprématie sur le christianisme et le judaïsme.

À tel point que dans l’islam orthodoxe, on veille à ce que cet « outil » ne prenne tout de même pas trop d’importance sur le plan religieux, par crainte d’une sorte de ‘’judaïsation’’ de l’islam.

On ne peut vouloir la paix à Jérusalem sans prendre en compte l’histoire, et entre autres, la mémoire juive concernant Jérusalem.

Chaque fois que cette ville a été administrée par des non-juifs, ce fut une catastrophe pour les Juifs.

Ils en ont été bannis (Empire byzantin), ou humiliés et gardés dans un état de pauvreté avec des pogroms à l’occasion (croisades, islam).

C’est ce que montre l’histoire de Jérusalem depuis plus de 2000 ans, et notamment depuis le 19ème siècle.

Durant celui-ci, la ville était une bourgade insignifiante de l’empire ottoman, délaissée, sans aucune importance politique ou religieuse, où les Juifs, majoritaires, vivaient dans une grande pauvreté et humiliation.

Quand le sionisme s’est développé, à partir de la fin du 19ème siècle, l’islam a redonné de l’importance à Jérusalem (comme au temps de la conquête, comme au temps des croisades), en en faisant un symbole du combat arabe contre le sionisme.

Entre 1948 et 1967, sous domination arabe, sans rivalité juive ni chrétienne, la ville est redevenue à nouveau une bourgade insignifiante, en voie de sous-développement, totalement abandonnée sur le plan économique, politique et religieux.

Sa population chrétienne a été divisée par deux durant ces 19 ans. Elle fut surtout « judenrein ».

Il a fallu la reprise de la ville par Israël en 1967, suite à la guerre des Six Jours, pour que le flambeau musulman sur Jérusalem reprenne du service.

Lors de cette guerre, les Israéliens espéraient ne pas ouvrir un front à Jérusalem. Ils pensaient que le roi Hussein de Jordanie resterait à l’écart du conflit.

Ils prévoyaient le statut quo sur la ville, avec la séparation est-ouest opérée en 1948.

Mais la Jordanie a ouvert le feu, obligeant l’armée israélienne à reprendre la ville. Là encore, cette mémoire ne peut être évacuée d’un revers d’antisionisme.

Toute la politique arabe, depuis des siècles, a poussé les Juifs à reprendre Jérusalem.

Comment peut-on leur demander de façon péremptoire et inconditionnelle de partager la ville, de façon « équitable », pour reprendre le terme de Sabîl ?

On se demande d’ailleurs ce que signifie « équitable » pour Sabîl.

Pour compléter cette mémoire, il faut prendre en compte le fait que durant les émeutes arabes de 1920-1921, les Juifs vivant dans le quartier mixte de Jérusalem-est ont été expulsés par les Arabes.

Ce quartier, totalement « déjudaïsé » (destruction des synagogues, etc…), est devenu l’actuel quartier « musulman » de Jérusalem-est, vide de tout Juif. Ce sont les Britanniques qui l’ont nommé ainsi.

Cette mémoire ne peut être effacée d’un revers d’antisionisme.

Les « colonies illégales » comme dit Sabîl, sont, dans certains cas (pas tous, il y a aussi des injustices contre les Arabes dans l’administration de la ville), des habitations rachetées par des Juifs, parfois des habitations juives d’avant 1920.

En 1948, lorsque les Jordaniens ont administré Jérusalem-est, les habitants juifs en ont été expulsés, leurs habitations brûlées et leurs lieux saints profanés (pierres tombales transformées en WC publics, par exemple). / Cette mémoire ne peut être effacée d’un revers d’antisionisme.

L’histoire de la grande synagogue de la vieille ville de Jérusalem-est, la Hourva, est particulièrement édifiante à ce propos.

Elle fut édifiée au tout début du 18ème siècle, pour être détruite 20 ans plus tard par les musulmans.

Au 19ème siècle, elle fut reconstruite, pour être à nouveau détruite en 1948 quand les Jordaniens occupèrent Jérusalem-est.

Elle vient tout juste d’être reconstruite et inaugurée en mars 2011. Elle devient aussitôt un argument anti-israélien dans la bouche de dirigeants politiques et religieux palestiniens.

En 2000 et 2001, lors des accords de Taba et Camp David II, le Premier ministre travailliste israélien Ehud Barack négociait le partage de Jérusalem. Arafat ne cessait de nier l’histoire juive à Jérusalem, jusqu’à l’existence même d’un temple juif.

Des négociateurs occidentaux en ont parlé, dévoilant le caractère tragicomique et burlesque de la chose. Burlesque, mais catastrophique sur le plan politique !

Le négationnisme dans le monde arabe, sur la Shoa et sur l’histoire juive en général, est fréquent. Mahmoud Abbas est diplômé d’une université soviétique (Patrice Lumumba) avec une thèse négationniste.

On ne peut évacuer cela d’un simple revers d’antisionisme.

Quand on prône des négociations sur Jérusalem, on doit en tenir compte.

Le texte de Sabîl ne prône d’ailleurs pas des négociations. Il lance des injonctions à l’égard de la communauté internationale, contre Israël, exigeant « de mettre fin à l’occupation israélienne », « qu’il [L’Etat d’Israël] arrête la création et le développement de colonies illégales au cœur des quartiers palestiniens… », « qu’il détruise le mur qui encercle la ville, et tous les postes de contrôle… ».

Ces injonctions sont d’un total irréalisme, comme si le terrorisme avait disparu, comme si Israël allait s’incliner comme ça, d’un coup de baguette magique, à l’encontre de ses intérêts politiques et sécuritaires. / Il est d’ailleurs remarquable que le mot « négociation » soit absent de cet appel à la paix.

Le problème de Sabîl est que son parti pris fait de ce conflit la lutte d’un méchant absolu (l’Etat d’Israël, véritable incarnation du mal) d’un côté contre de pauvres victimes innocentes de l’autre (les Arabes palestiniens). Cet appel à la paix le prouve une fois de plus.

Cette approche est erronée.

L’appel à la « réconciliation » que lance Sabîl présente par conséquent une bien faible crédibilité.

Certes, la politique israélienne est désespérante pour tous ceux qui aspirent à la paix. Il y a des discriminations envers les Arabes en Israël, notamment à Jérusalem. Mais la politique arabe palestinienne l’est tout autant.

Mahmoud Abbas a réaffirmé très officiellement que le futur Etat arabe palestinien serait vide de tout Juif, même ceux pouvant faire partie d’une force armée internationale d’interposition.

Or il est inconcevable de faire accepter aux Juifs de ne plus pouvoir habiter à Jérusalem-est.

L’organisation chrétienne palestinienne Sabîl, avec à sa tête le prêtre anglican Naïm Ateek, exploite une théologie de la libération et un militantisme anti-israélien qui se nourrissent mutuellement.

Le peuple juif, Israël, est un peuple déchu, remplacé par l’Eglise.

Cette théologie de la substitution est réaffirmée par Sabîl bien qu’elle ait été invalidée par l’Eglise catholique (déclaration Nostra Aetate) et la plupart des Eglises protestantes (Concorde de Leuenberg, texte sur l’Eglise et Israël).  Elle est confortée par l’argumentation antisioniste qui fait du sionisme et de l’État d’Israël une sorte d’incarnation du mal dont sont victimes les Arabes palestiniens.

Le discours de Sabîl, irrecevable pour un grand nombre de juifs et de non-juifs attachés à l’existence de l’État d’Israël, ne peut pas contribuer à une parole de réconciliation, une parole qui responsabilise.

Or, c’est par cette responsabilisation « bilatérale » que peut advenir une réconciliation et la paix.

Partager cet article
Repost0
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :