Le jour où Nicolas Sarkozy rencontre Obama et parle d’Israël
pour le site Objectif-Info
31/03/2010
"Pour le Moyen-Orient, c’est une très bonne nouvelle que les Etats-Unis s’engagent à ce point. Bien sûr que la paix au Moyen-Orient c’est l’affaire des Palestiniens et des Israéliens. Mais l’absence de paix au Moyen-Orient c’est un problème pour nous tous, parce que ça entretient le terrorisme partout dans le monde, et je dois dire ma solidarité absolue avec le président Obama dans la condamnation du processus de colonisation. Tout le monde sait combien je suis engagé au service de la sécurité d’Israël, mais la colonisation n’amène en rien à la sécurité d’Israël. Il est venu le moment où il faut prendre des initiatives en faveur de la paix."
En Europe, on a beaucoup critiqué G. W. Bush pour sa passivité dans le conflit du Proche-Orient. En fait, épousant l’habile position des Palestiniens de Ramallah, les Européens lui reprochaient de ne pas imposer assez de choses à Israël. Cette critique était doublement absurde. Bush est énormément intervenu sur la situation dans cette région. Il a imposé l’idée, devenue impérative, d’une solution à deux état, il a poussé à l’évacuation de Gaza dont on connaît les conséquences pour la région, et il a obtenu que le Hamas soit autorisé à présenter ses candidats à des élections qu’il a gagnées, mais dont il aurait dû être exclu puisqu’il ne reconnaît pas les traités qui les imposent. Bush a aussi répandu le mythe de la différence entre le terrorisme d’attentats-suicide qui a touché l’Amérique, l’Europe et le reste du monde d’un coté, et le terrorisme-suicide contre les israéliens de l’autre. Il a également contribué à la mystification présentant Mahmoud Abbas comme un dirigeant modéré. Il s’est cependant abstenu de jeter Isrël "sous les roues de l’autobus". Effectivement, Israël constitue pour l’Amérique (et l’Europe) une sorte de verrou contre le déferlement jihadiste qui pourrait emporter les régimes alliés des Occientaux de Jordanie,du Golfe, d’Arabie saoudite et d’Égypte. Bush a donc veillé à ce que la balance des forces n’emporte pas Israël, fournissant à ce pays un appui diplomatique contre les emportements du noyau de dictatures qui domine l’ONU et les surenchères de nombreux états européens, au premier rang la France de Chirac.
La politique d’Obama est-elle une bonne nouvelle? On observe que cette politique a frappé de stupeur l’opinion et la classe politique américaine dans son ensemble. Obma s’est aligné sur les demandes palestiniennes – mais l’attitude de Bush était assez semblable –; surtout, il a tordu publiquement le bras d’Israël. Il désire apparemment qu’Israël consente à briser la colonne vertébrale de son ’espérance multiséculaire, le retour de Jérusalem à la nation juive, et qu’il accepte de baisser les bras sur les dispositions les plus essentielles de sa sécurité : paralyser l’effort de guerre du Hamas à Gaza, exiger un état palestinien non jihadiste en Cisjordanie, et être doté de frontières défendables. Cette exigence est prévue par les grandes résolutions du Conseil de sécurité de l’ONU, adoptées sous l’égide des gouvernements américains successifs depuis plus de quatre décennies (la résolution 242 date de 1967). En gros, la bonne nouvelle d’Obama, c’est qu’il continue la politique pro palestinienne de Bush, mais qu’à la différence de son prédecesseur, il jette Israël sous l’autobus.
Mais si l’on prend un peu de hauteur, les conséquences des emportements récents de l’administration américaine contre Israël sont beaucoup plus graves.
Soit Israël s’incline et exécute les ukases qu’on lui impose, et alors il va entrer dans un cycle de dislocation interne, ayant perdu avec Jérusalem le symbole national des ses aspirations, et ayant renoncé à une sécurité intraitable, le ciment de sa société. On peut imaginer que s’ouvrirait alors un épisode de très grande instabilité marque par des troubles et des guerres (fruits de la faiblesse des "modérés" palestiniens, d’une poussée du jihad revigoré, et d’une influence de plus en plus marquée de l’axe Iran-Syrie). Troubles, guerres, et sentiment de mise au ban du monde civilisé se combinant pour créer cette situation de désespoir et de faillite économique, menant les israéliens à quitter leur pays dans une spirale d’affaissement. C’en serait fini d’Israël, mais aussi du providentiel verrou qui fit barrage naguère à la pénétration soviétique dans les états pétroliers alliés de l’Occident et qui permet aujourd’hui à l’Europe et à l’Amérique de disposer d’un verrou contre la poussée jihadiste qui risque bien de "somaliser" les grands états arabes du flanc sud de l’Europe.
Soit Israël refuse, et entre dans une opposition frontale avec l’administration américaine. Au lieu de s’occuper du péril iranien, celle-ci mettra alors en application les menaces qu’Obama n’a pas manqué d’enumérer à Netanyahou lors de leur sinistre entrevue à la Maison Blanche : une coalition euro-américaine ferait passer une résolution du Conseil de Sécurité de l’ONU imposant une partition de Jérusalem, la création d’un état palestinien, et éventuellement le déploiement de troupes occidentales en Cisjordanie sur les frontières du nouvel état, face à Israël. Imaginons l’hypothèse apocalyptique ou un soldat américain serait tué par des balles israéliennes ! Cette phase diplomatique serait bien naturellement assortie d’un embargo sur les livraisons d’armes (qui est déjà imposé de facto pour les matériels sensibles) et peut-être de mesures commerciales et financières. On voit mal le gouvernement Netanyahou résister à un tel tsunami. S’ouvrirait alors une période de troubles politiques en Israël opposant les partisans de la capitulation sans conditions et les tenants de la résistance. Toutes les aventures deviendraient possibles, encouragées par les provocations inévitables du jihad moyen-oriental encouragé par l’axe Iran-Syrie, et les répliques armées d’Israël. Ce scénario rejoint le précédent, une spirale de décomposition aboutissant à la lente disparition de l’état juif dans des tourbillons qui n’épargneraient pas l’Europe. La seule éventualité favorable serait que ce soit Obama qui cède sous la poussée du Congrès et de l’opinion, les élections de novembre approchant à grands pas.
Ce scénario plutôt épouvantable pour toutes les parties, c’est la bonne nouvelle qu’a annoncée le président Sarkozy le 30 mars à Washington.
Le président s’interroge sur les conséquences de la non-paix mais étrangement il ne se pose pas la question des causes de l’absence de paix au Moyen-Orient. Dans son fameux discours du 14 juin 2009 à l’université Bar Ilan, Netanyahou, lui, a posé cette questio,n indispensable dans la mesure où l’impasse dure depuis plusieurs décennies, ce qui n’est pas courant pour un conflit de l’époque contemporaine. La réponse que le premier ministre a donnée est du plus grand intérêt car elle ne met pas en cause tel ou tel homme, tel ou tel groupe politique ou idéologique, mais l’un des fondements civilisationnels des peuples de la région. Il y a d’un coté une nation juive qui a une longue histoire, un ancrage dans cette terre remontant à l’antiquité, une présence quasiment initerrompue à Jérusalem sauf dans les brefs épisodes où elle était rigoureusement interdite, présence surement majoritaire depuis le 19ème siècle. De l’autre il y a une immense région colonisée il y a près de 14 siécle par l’expansion arabe (13,5 millions de km2, contre un peu plus de 20.000 pour Israël) où s’est répandu depuis l’effondrement du califat ottoman un islam de guerre et de revanche (le wahhabisme déjà présent mais revigoré après 1945 et l’islam des Frères musulmans qui a accouché du Hamas et d’Al Quaeda), professant qu’un pouvoir Infidèle ne saurait se perpétuer sur une terre qui a été un jour une terre d’islam.
Si la guerre n’a pas trouvé de solution depuis si longtemps, c’est parce que, sauf à se voir accusés d’être des ennemis d’Allah voué à l’exécution par le premier venu, les dirigeants arabes ne peuvent pas reconnaître l’existence d’un pouvoir non-musulman entre le Jourdain et la Méditerranée, quelle que soit sa taille et ses orientations politiques. Anouar el Sadate en a fait l’expérience. Comme Israël ne veut pas rendre l’âme de son plein gré, il subordonne la cession de l’espace tampon entre le jihad et lui-même, la Cisjordanie, à sa reconnaissance pour ce qu’il est : un pouvoir juif, non-musulman, au Proche-Orient. Israël a accepté les compromis les plus improbables et risqués, mais jamais un dirigeant arabe n’a accepté de signer un texte avalisant de façon définitive la création d’un état palestinien subordoné à la reconnaissance d’Israël, toute revendication ultérieure étant exclue. Et cela dure depuis 1937.
Pour Nicolas Sarkozy, en vertu d’une théorie chère au Quai d’Orsay désormais adoptée par l’administration Obama, le conflit israélo-palestinien est la source de tous les autres conflits au Moyen-Orient, voire dans le monde entier. Il faut y mettre un terme, fût-ce en imposant une solution avec brutalité, pour en finir avec le terrorisme.
Mais imposer quelle solution? Celle qui consiste à éliminer Israël? Ou celle qui consiste à imposer au monde arabe ce dont il ne veut pas, la reconnaissance d’un état juif. La première solution, éliminer Israël, est possible on l’a vu. Israël vit en osmose avec le monde occidental et il ne survivrait pas à l’opération chirugicale qui semble tenter M. Obama et ses amis. Mais que de troubles et de guerres en perspective. L’Occident déjà fort mal en point survivrait-il lui-même au tourbillon? Dans quel état ? La question mérite d’être posée.
La seconde solution est impossible à mettre en œuvre. Nul ne pourra imposer aux Arabes qui refusent Israël pour des raisons religieuses dans un contexte tribal de signer leur arrêt de mort. Ils n’accepteront que des textes en trompe l’œil, permettant de passer d’une étape à la suivante du processus d’affaiblissement puis d’effondrement du pouvoir juif.
Pointe alors une troisième hypothèse, celle que MM. Obama et Sarkozy n’envisagent pas : la consolidation d’un équilibre stratégique entre Israël et son environnement, un appui politique, diplomatique et militaire dissuasif accordé à ce pays permettant de convaincre les amateurs d’épreuve de force et tout le jihad international que ce pays est imprenable aujourd’hui, et que c’est une tâche pour les générations futures si cela leur chante. La seule chance, non de la paix mais de la non-guerre, c’est un Israël fort et soutenu. Il a suffi de quelques déclarations outrancières sur commande des collaborateurs d’Obama pour allumer immédiatement des émeutes à Jérusalem. L’effet inverse est tout aussi facile à obtenir. Si l’on veut vraiment la paix, Monsieur le président de la République, c’est du coté d’Israël qu’il faut se mettre. C’est le seul moyen d’assagir les fauteurs de guerre. Mais il faut pour cela être un homme d’état, ce qui n’est pas nécessairement aisé, et faire preuve de la constance voulue face aux pressions et aux manœuvres dilatoires des dictatures et des chefferies arabes.
Et le terrorisme? C’est là une vraie question. Et la réponse n’est pas celle du président. Pourquoi y a-t-il dans le monde arabe autant de jeunes hommes qui haïssent à ce point l’Occident ? A cause de son soutien à Israël? Pas du tout. Le journaliste Bret Stephens en a donné dans The Wall Street Journal une explication lumineuse. Si ces gens se sentent à ce point offensés par l’Occident, c’est parce que l’idéologie de Hassan al-Banna et Sayyid Qotb, leur boussole, s’est construite dans le rejet le plus absolu du mode de vie et de la façon d’être de la civilisation occidentale. La femme libre, des droits aux homosexuels, la liberté religieuse et le droit de ne pas croire, les outrances des pop stars et du cinéma, la musique elle-même, représentent pour ces idéologues religieux des agressions d’une intensité insoutenable. Devant ce spectacle, même à distance, des démagogues mettront facilement un fusil ou un couteau entre les mains du jeune jihadiste et une ceinture d’explosifs à sa taille. Et s’ils veulent savoir pourquoi le phénomène s’est étendu au monde entier, nos chers amis américains devront s’interroger sur les milliards de dollars saoudiens, issus du pétrole, qui ont irrigué pendant des décennies les madrassas et les autres institutions religieuses musulmanes des trois continents, Europe comprise. Ces milliards de pétrodollars saoudiens ont transformé l’islam traditionnel du monde musulman en un islam belliciste, et l’idéologie des peuples islamisés à cette sauce en une haine anti occidentale inextinguible. Anti occidentale, pas antisioniste, cela lui ferait trop d’honneur le sionisme étant une quantité trop négligeable. Mais s’attaquer à ce genre de question, prendre le problème à la racine, voila qui est sans doute plus difficile et exige plus de trempe que de s’en prendre à Israël au moment où ses nombreux ennemis conjuguent leurs menaces contre lui comme jamais.
"Colonisation", encore l’une de ces formules mécanique, l’arme délicieuse des politiques et des média pour empécher le citoyen et l’opinion de penser et de comprendre. Une expression qui désigne l’expansion mondiale de l’Europe entre le 15ème et le 20ème siècle, et qui conserve toujours en France le goût amer de la guerre d’Algérie et des divisions douloureuses de la nation. La transposition à Israël du rapport colonial (un pays étranger prend le contrôle d’un autre pays, y installe un pouvoir à sa discrétion, et entreprend d’exploiter ses ressources) n’a aucune pertinence sauf comme artifice de propagande pour délégitimer Israël au sein des nations ex-coloniales.
Les Occidentaux devraient faire quelques comparaisons historiques pour prendre conscience qu’ils ont été de piètres colonisateurs (les Arabes ont réussi la colonisation d’immenses territoires sur plusieurs continents et cela dure encore après 14 siècles bien plus que l’ancienne Rome, les Mongols ont réalisé aussi des conquêtes impressionnantes sous diverses appellations, … Et que gagnent-t-ils, ces Occidentaux, à projeter leur montagne de culpabilité et d’hostilité sur le minuscule Israël qui "occuperait" 5000 km2, croyant trouver ainsi le salut !
Le problème c’est qu’il ne les a pas colonisés, ces 5000 km2. Israël est en Cisjordanie parce qu’il a été attaqué au cours d’une guerre, malgré ses mises en garde insistantes du souverain jordanien. (1967) La Cisjordanie n’est pas un pays. Depuis les antiques royaumes juifs, elle a été occupée par d’innombrables vainqueurs, mais jamais aucun d’entre eux ne lui a donné le statut d’un pays, d’une nation ou d’un état, jamais une de ses villes n’a été érigée en capitale. Après une domination ottomane de 4 siècles, elle a été remise sous statut mandataire aux Anglais, et à leur départ, elle est tombée entre les mains de la Jordanie. Israël ne désire nullement gouverner ce non-pays, ni les Palestiniens qui y vivent, et il a fait plusieurs offres de retrait (Barak 2000, Barak 2001, Olmert 2008), toutes refusées. Israël n’y a jamais installé aucun pouvoir à sa botte, et il n’exploite aucune de ses ressources. Par contre, suite aux guerres qui ont été menées contre lui, devant le refus arabe d’une transaction après la guerre des Six-jours (le triple "non" de Khartoum en septembre 1967), Israël a tenu à contrôler les hauteurs et à verrouiller les axes de pénétration naturels vers ses centres vitaux. Il a installé progressivement des implantations garantissant cette présence stratégique. Avec le temps (et la durée du refus arabe) certaines d’entre elles ont grandi, leur taille interdisant toute transplantation de leurs habitants. C’est pourquoi Israël, pays minuscule, a toujours proposé dans ses offres de solution de paix, des échanges de terre.
Voila pour la colonisation que le président de la République condamnait solennellement à Washington. Evidemment Jérusalem est exclu de cette catégorie ou Obama et l’Europe tiennent tant à la faire entrer. Les Juifs d’Israël tiennent Jérusalem pour leur capitale. Elle a été récupérée des mains d’un occupant étranger suite à une agression militaire, donc de façon parfaitement légale. Les Jordaniens ont procédé en 1949 à un transfert de population arabe dans Jérusalem et à une nettoyage ethnique des juifs présents, de leurs biens et de leurs lieux de culte lors de sa capture en 1949, ce qui a autorisé l’image fausse d’une Jérusalem-Est arabe de toute éternité. Et ces Arabes de Jérusalem tiennent tant à leur intégration à la "Palestine" que malgré les menaces, ils ont souvent tenté en 2007 et 2008, de prendre la nationalité israélienne ou de s’installer en-deçà des lignes de 1967, quand l’éventualité d’une partition se précisait.
La "solidarité absolue" de Nicolas Sarkozy avec Obama est piètre au possible. Elle signe cette absence de hauteur de vues des dirigeants français, incapables de percevoir que la revendication arabe n’est que la couverture, le prétexte d’une autre revendication, la disparition de l’état juif, qui poserait on l’a vu de très sérieux problèmes à l’Occident. Mais elle signe aussi un alignement sur un dirigeant étranger équivoque, Barack Hussein Obama (il tient au "Hussein"), dont les premiers pas en politique appliquée ont été désastreux. Après l’avoir défiée sur son socle culturel lors de la réforme du système de santé, Obama a désormais l’opinion publique nationale à dos. En politique internationale, sa seule intention claire semble être le repli général à tout prix. L’Amérique risque de le payer très cher, et elle est en train de le comprendre en prenant conscience de sa funeste passivité devant la poursuite du programme nucléaire de l’Iran.
La France doit miser sur le bon cheval et Obama n’est pas le bon cheval. On dira que la démarche du président Sarkozy avait justement pour but de réveiller le passif et retors Obama sur la question de l’Iran dont les missiles nucléaires menaceront très bientôt Paris, Marseille, Lyon, Bordeaux. L’homme Obama et sa politique de séduction des islamofascistes comme on en trouve en Iran, n’a désormais plus aucun secret. Le seul moyen d’éviter la tragédie mondiale que serait l’Iran nucléaire, c’est de s’adresser à l’Amérique, au peuple, à l’opinion, au Congrès, et de rester ferme sur les valeurs des démocraties au lieu de justifier les attaques gratuites d’Israël qui lui servent à masquer son incompétence et sa politique de démission.