Critique du livre : Palestine trahie d’Efraïm KARSH
source : http://elderofziyon.blogspot.com/
Adaptation française de Mordeh'aï

Karsh relate un fait étonnant du fait que le leadership Sioniste voulait intégrer et vivre avec leurs cousins arabes dans la paix. Il rapporte citation après la citation, d’ Herzl à Jabotinsky en passant par Ben Gurion, qui montre que le plan de purification ethnique des Arabes que l'on nous décrit continuellement est aujourd'hui pure et simple fiction. Il entre dans quelques détails sur la coopération judéo-arabe, immédiatement après la Déclaration Balfour - et ce avant le Mufti.-.
Une grande partie du reproche de la grave détérioration de la relation entre les communautés est directement attribuée à Hadj Amin Husseini, qui presque à lui seul a conduit les Arabes palestiniens à la catastrophe - comme Mufti de Jérusalem, comme président du Conseil suprême musulman, et aussi en tant que président du Haut Comité Arabe.
Son indéfectible antisémitisme combiné à ses penchants du pouvoir et à sa capacité à contrecarrer ses rivaux ont créés une atmosphère où le compromis était impensable. Karsh montre également que Husseini, loin d'être un nationaliste, a toujours été plus intéressé par une nation pan-arabique - en premier lieu dans le cadre de la Grande Syrie, mais même plus tard, il a vu la Palestine arabe comme un tremplin vers l'unification du pan-arabisme.
Karsh suit sa carrière depuis Jérusalem jusqu’à sa transformation en sympathisant nazi.
La pièce maîtresse de l'ouvrage est la description des combats et l'exode des arabes au cours de la première partie de la guerre d'Indépendance. Karsh met en avant un argument de poids que la grande majorité des Arabes a fui leur foyer en raison de la peur, et souvent en dépit des incitations juives de rester sur place. Il entre dans le détail de la fuite des Arabes de Haifa et de Jaffa, dans la mésintelligence complète du leadership arabe et de la quasi-inexistence d'un front arabe unifié, ni avec ou sans la Palestine.
(Un détail fascinant à Haifa:la fuite des Arabes s'est déroulée durant la Pâque juive et le rabbinat de Haifa a donné une dispense spéciale aux boulangers juifs pour cuire du pain pour les Arabes afin de les aider car leur infrastructure n'existait plus.)
Selon Karsh, la seule expulsion par des forces israéliennes dans un secteur majeur arabe urbain était celui de Lydda (Lod), où la Haganah a craint qu'une arrière-garde potentielle ne se batte avec force et puisse mettre en danger l’avance de ses forces. Il mentionne quelques villages plus petits qui ont été décimés par les forces juives et il en donne une justification militaire pour certains.
En fait, Karsh fournit une listing en annexe du nombre d'Arabes qui se sont enfuis de chaque ville et village, environ 600,000 réfugiés au total, un peu moins que les chiffres de l'ONU et des revendications arabes de l'époque, qui ont souvent été gonflés. Karsh montre aussi très clairement que même si les Arabes avaient gagné la guerre, il n'y aurait pas aujourd'hui de Palestine car l'Egypte,la Transjordanie et la Syrie avaient prévu de se partager tout ce qu'ils auraient pu prendre. Le roi Abdullah de Transjordanie était disposé à autoriser une présence juive autonome mais minuscule autour de Haifa.
Tandis que Karsh examine dans le détail les premières phases de l'exode arabe, environ jusqu'en Juin 1948, puis il ignore ou presque les périodes suivantes jusqu'en Novembre.
Cela semble être une lacune,alors que Benny Morris lui, entre vraiment dans les détails.Pourtant même quand Morris reconnaît qu’il y ait eu ce qu'il nomme "des atrocités", elles étaient l'exception et la plupart des fuyards arabes cédaient plus à la panique même dans les dernières phases du combat.
C'est juste que les détails qu'il donne soient si stupéfiants qu'il semble que des actes peu recommandables aient été beaucoup plus fréquents qu'ils ne l'aient été en réalité. Un autre défaut apparent du livre de Karsh est qu'il semble minimiser le rôle de l'Irgoun et du groupe Stern. Alors que son argument de la nature conciliante de la direction de la Haganah semble bien fondé, il apparaît que Karsh est embarrassé par les actes terroristes indéniables de l'Irgoun, les justifiant de temps en temps comme des représailles et d'autres fois réduisant au minimum leur importance.
Cependant, il me semble que cette question doit être traitée avec plus d’honnêteté - tant en termes pour dénoncer la terreur, que dans le fait que des actes ont précipité en grande partie l’exode des arabes (et, nul doute,la décision britannique de quitter la Palestine.)
La guerre n'est jamais propre à 100%.
En épilogue Karsh tire une ligne directe de Husseini à Arafat et au-delà, montre que l'intransigeance arabe n'a pas beaucoup changé bien qu'elle soit emballé différemment.
Une histoire vraiment impartiale du conflit est probablement impossible à écrire.
La partialité de Karsh n’est pas moins évidente que celle de Morris ou de Segev, mais elle est un contrepoint nécessaire à l'opinion dominante communément admise.
Les arguments de Karsh sont bien faits et bien transcrits, il exhume un grand nombre de sources fondamentales précédemment ignorées, particulièrement d'archives britanniques.
Les mêmes événements peuvent être utilisés pour tirer des conclusions différentes et c'est en fin de compte au lecteur de déterminer si l'auteur a réussi à étayer son point de vue avec des faits solides. Pour une grande partie, Karsh a réussi.
Le récit Sioniste est au moins aussi valable que celui des révisionnistes (et beaucoup plus que celui des Arabes) et il doit être considéré comme tel. En tant que tel , le livre de Karsh est inestimable.