Pour la plupart des observateurs, la responsabilité de l’absence des sépharades au sein du Mouvement Sioniste incomberait aux Achkénazes qui les auraient évincés . Quand bien même, l’accusation reste partiellement fondée, on déplorera l’absence d’intérêt des sépharades pour le sionisme, entendu comme courant issu de la conscience non religieuse mais citoyenne et nationale.
Le sionisme politique naquit en Europe et, globalement, pour parvenir à devenir une force, un courant déterminant, au sein des communautés juives, il se détacha du monde rabbinique qui lui retira toute légitimité, parce qu’il ne s’inscrivait pas dans l’attente messianique, que sa volonté humaniste et son projet progressiste entendaient se soustraire et s’extraire. Par ailleurs, la philosophie des premiers dirigeants sionistes s’dentifiait plus au matérialisme qu’elle ne se réclamait de toute référence au spirituel.
Il y a probablement quelque chose de similaire dans la volonté de réforme issue de la Révolution Française de 1789. Edifier un monde nouveau avec un nouvel homme qui n’auront plus de lien avec la projection religieuse.
Pourquoi le sionisme politique n’est pas né, ne pouvait pas naître dans le monde sépharade ? Parce que le monde sépharade n’avait pas initié une démarche semblable et n’était ni prêt, ni volontaire à laïciser le retour à Sion qui devait rester une initiative d’ordre religieux.
Le mouvement sioniste de Herzl suscita chez les sépharades les mêmes réserves qu’il fit naître chez les rabbins Européens : les Juifs ne pouvaient ni ne devaient cautionner une déviance agnostique qui prétendrait reconstruire Sion sans l’aide des principes rabbiniques.
Les Juifs vivant dans les pays Arabes ne pouvaient qu’imaginer la conscience citoyenne, alors que celle-ci faisait partie de l’univers familier du monde achkénaze depuis le XVIIIème siècle.
Participer au mouvement sioniste supposait donc, non seulement, s’écarter de la Tradition, mais avoir, en amont, franchi toutes les étapes qui ne pouvaient empêcher de mener immanquablement à la rupture. Cela revient à dire, que devenir sioniste dans ces conditions, c’était affirmer sa capacité à passer de l’environnement religieux au paysage culturel laïque. Accepter aussi la conscience citoyenne, en sachant que cette façon de faire se rapproche plus de l’athéisme que de la Fidélité à la Tradition.
Or, cette perspective n’était ni dans les intentions ni dans les possibilités du monde sépharade.
NB/ La prochaine parution expliquera la façon souvent indigne, avec laquelle quelques dirigeants sionistes profitèrent de la naïveté de certaines communautés sépharades.