L’Iran hier, l’Egypte aujourd’hui. La même erreur des Etats-Unis
08/02/2011
Source : Le CAPE de Jerusalem
Dore Gold
En 1979, le Président Jimmy Carter a pensé que s’il lâchait le shah et tendrait la main à Khomeiny, il favoriserait à établir la démocratie en Iran. Aujourd’hui, un autre président américain refait la même erreur face au régime de Moubarak en Egypte.
L’Histoire se répète. Le Président Carter se trouvait à l’époque face à une crise semblable à celle qu’affronte actuellement le Président Obama. Des manifestations monstres envahissaient les rues de Téhéran et appelaient à la chute du shah, l’allié principal des Etats-Unis dans le Golfe persique.
La Maison blanche se trouvait dans un grand dilemme : fallait-il soutenir le régime du shah ou chercher une alternative. Le Département d’Etat a recommandé d’établir une coalition de politiciens iraniens pour pouvoir prendre les rênes du pouvoir. Des universitaires américains et même des fonctionnaires de l’Etat pensaient que les Etats-Unis devraient tendre la main à ayatollah Khomeiny encore en exil.
Dans leurs analyses, les experts ont suggéré à coopérer avec le chef spirituel chiite. L’ambassadeur américain en Iran, William Sullivan affirmait que Khomeiny collaborerait avec les jeunes officiers de l’armée du Shah. Richard Falk de l’université de Princeton, a écrit en février 1979 dans le « New York Times » un article intitulé « nous avons confiance en Khomeiny ». Selon Falk, Khomeiny est entouré d’hommes politiques et conseillers modérés ayant « de véritables préoccupations pour les droits de l’Homme ».
De nombreuses parallèles existent avec la politique étrangère américaine au sujet de l’Egypte
Premièrement on constate que l’administration d’Obama tente de garder toutes les options ouvertes, comme celle de Carter, l’équipe d’Obama est décrite comme hésitante. Washington n’appelle pas Moubarak à quitter le pouvoir, mais ne soutient pas non plus son gouvernement. En fait, le message adressé à Moubarak est sec et même humiliant. / Le porte-parole de la Maison blanche, Robert Gibbs est allé encore plus loin et dans un briefing aux journalistes il a menacé de couper l’aide américaine, au moment où le gouvernement égyptien se trouve le dos au mur et a du mal à contrecarrer les manifestations et maîtriser la crise.
Cela signifie t-il qu’à chaque fois qu’un dirigeant arabe se trouve en détresse les Etats-Unis pourront l’abandonner brusquement ?
Parallèlement à la gestion américaine de la crise iranienne et la nomination de Chaapour Bakhtiar, nombreux en Occident appellent aujourd’hui à la nomination de Mohamed El Baradai , ancien chef de l’Agence internationale de l’énergie atomique, comme président par intérim à la place de Moubarak. El Baradai jouit de l’appui des « Frères musulmans ». Il serait pour eux l’homme providentiel pour apaiser l’Occident suite à une éventuelle chute de Moubarak.
El Baradai ne gagne pas la sympathie et le soutien des masses populaires étant donné qu’il a vécu plusieurs années hors de l’Egypte. Il constituera un maillon provisoire et faible.
La confrérie des Frères musulmans est une organisation bien structurée en Egypte et elle bénéficie d’un énorme soutien populaire. Elle pourra du jour au lendemain écarter sans difficultés El Baradai.
Un troisième point parallèle, et probablement le plus dangereux, entre l’Iran de 1979 et l’Egypte de 2011 est la manière dans laquelle l’Occident interprète les dangers de l’islam intégriste.
Le 31 janvier dernier, le porte-parole de la Maison Blanche n’a pas exclu, et pour la première fois, un premier rôle aux Frères musulmans au sein d’un gouvernement égyptien. Dans certains cercles de l’Administration d’Obama on entend depuis quelques temps des voix appelant dans ce sens. Pour exemple, le Foreign-Affairs a publié un article intitulé « les Frères musulmans modérés ». Des anciens directeurs du Renseignement et de la Défense avancent vigoureusement cette position. Un ancien membre de CIA de l’Institut Saban, a affirmé récemment que les Etats-Unis ne doivent pas craindre les Frères musulmans.
Il est donc impératif que les gouvernements occidentaux examinent avec sagesse les conséquences de la montée au pouvoir des Frères musulmans en Egypte et les enjeux pour toute la région.