L’affaire Biden… Et ce qu’elle signifie vraiment.
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Qui a pris l’initiative de publier le 9 mars, alors que le vice-président américain Joe Biden effectuait une visite en Israël, un « communiqué » sur un projet d’extension du quartier de Ramat-Chlomo à Jérusalem ? Et surtout, qui a fait en sorte que les médias le reçoivent dans les meilleurs délais, alors que ce projet n’en était qu’au niveau de discussions préliminaires ? Le texte émane du ministère de l’Intérieur. À priori, c’est donc le ministre, Elie Ichaï, l’un des dirigeants du parti orthodoxe Shas, qui est responsable. Mais un ministre ne suit pas les travaux de ses subordonnés au jour le jour, ni ne contresigne tous les communiqués de presse. Quelqu’un d’autre a pu intervenir, s’immiscer dans le processus de décision, hâter les choses. En vertu de tel ou de tel autre calcul.

Quand le président français Jacques Chirac, à l’automne 1995, transforme en affaire d’Etat un malentendu avec la police israélienne chargée d’assurer sa protection dans la Vieille Ville de Jérusalem, il révèle ce que sera pendant sa politique proche-orientale pendant les douze années à venir. De même aujourd’hui avec le vice-président américain Joe Biden, la secrétaire d’État Hillary Clinton, et bien sûr, derrière eux, le président Barack Obama. Ces derniers auraient pu se contenter de hausser les sourcils. Ils auraient pu s’en tenir aux explications – et aux « excuses », nullement nécessaires en soi - que le premier ministre israélien leur a immédiatement présentées. Ils ont passé outre. Et par là ne laissent plus le moindre doute sur leurs intentions à court, moyen et long terme.
Rappelons les faits. Joe Biden arrive en Israël le 8 mars au soir. L’atmosphère est confiante, détendue. Personne, ni du côté israélien, ni du côté américain, ne manque de rappeler que Biden, avant d’être élu vice-président aux côtés d’Obama en 2008, avait été l’un des sénateurs démocrates les plus fidèles à l’amitié israélo-américaine.
L’idylle se poursuit pendant la journée du 9. Le soir, le couple Nétanyaou doit recevoir le couple Biden à dîner. Mais entre-temps, à 18 heures, les médias israéliens diffusent un scoop selon lequel Israël s’apprêterait à faire construire 1600 logements supplémentaires à Ramat-Chlomo, au nord de Jérusalem. Dans ce que l’administration Obama, à la différence de toutes les administrations américaines précédentes, a décidé de considérer comme « Jérusalem-Est », c’est à dire comme un « territoire palestinien occupé ». Biden fait part de sa « colère » à un Nétanyaou stupéfait, qui fait immédiatement part de ses regrets. Le dîner est retardé.
En réalité, ce scoop est un faux. Le gouvernement israélien n’a pris aucune décision de ce type, ni à Ramat-Chlomo, ni ailleurs à « Jérusalem-Est ». Il ne s’agit que d’un projet parmi d’autres, soumis à une commission de planification régionale du ministère de l’Intérieur. La procédure, en Israël, consiste à débattre de tous les projets. Quitte à en rejeter la plupart, pour des raisons techniques, environnementales, financières ou, last but not least, politiques. Lara Friedmann le reconnaît dans une analyse publiée dès le 10 mars par les Amis américains du Mouvement La Paix Maintenant : « Il ne s’agit pas d’une décision définitive, mais de l’ouverture d’une discussion publique : une étape importante, mais pas irréversible, en vue de la véritable décision… Le gouvernement est en mesure de retirer ce plan à n’importe quel moment, s’il le désire. En fait, c’est exactement ce que le gouvernement Rabin avait fait, dans des circonstances analogues, en 1995. » Friedmann ajoute : « On a présenté cette mesure comme une provocation délibérée du gouvernement Netanyaou à l’égard de Biden. Rien n’est moins sûr. D’après les éléments dont nous disposons maintenant, il est à peu près certain que Netanyaou ne savait rien de ce projet et n’avait pas été prévenu d’un tel communiqué… Si la coïncidence avec la visite de Biden était voulue, c’est plutôt le ministre Ichaï qui est en cause, ou un fonctionnaire d’extrême-droite de son ministère. En fait, Netanyaou avait formellement demandé à Ichaï de s’abstenir de toute déclaration pendant la visite de Biden. »
L’hypothèse Ichaï n’est pas absurde en soi. Ramat-Chlomo est en effet un quartier orthodoxe (haredi), où la natalité est forte et les moyens financiers limités. Construire de nouveaux immeubles, ou annoncer qu’on va en construire, peut entrer dans le jeu électoral d’un parti se réclamant de l’orthodoxie. Pas plus absurde, la seconde hypothèse de Lara Friedmann : un fonctionnaire appartenant à l’aile « dure » de la droite « dure » israélienne. Acquis à la politique du pire, ce milieu a pu chercher à déstabiliser Netanyaou : ne l’a-t-il pas déjà fait tomber en 1999 ?
Mais il y a une troisième hypothèse : la provocation a peut être été ourdie par la gauche extrême qui, à la différence de la plupart des sympathisants de La Paix Maintenant, rejette le sionisme lui-même et le caractère juif d’Israël. Certains de ses membres, même sous un gouvernement de droite, occupent des fonctions officielles. Il ne leur est pas difficile de se procurer les « documents de travail » des divers ministères, d’encourager des décisions malheureuses et de les exploiter. De nombreux précédents pourraient être évoqués à cet égard. Dans le cas précis de Ramat-Chlomo, on peut noter que toutes les organisations se réclamant de l’extrême-gauche, du parti Meretz à l’ONG Ir Amim, dénoncent une « provocation » au moment même où le communiqué est publié. Comme s’ils en avaient connu la teneur à l’avance…
On peut même envisager une quatrième hypothèse selon laquelle les services diplomatiques ou les services secrets américains, agissant sur ordre du président Obama ou de ses collaborateurs les plus proches, ont monté un complot contre Netayaou en manipulant et instrumentalisant aussi bien des nationalistes israéliens que des gauchistes. Philippe de Macédoine, le père d’Alexandre le Grand, disait qu’ « aucune ville ne résistait à un âne chargé d’or ». Les grandes puissances modernes savent manier toutes les formes de séduction ou de corruption : l’argent, mais aussi la gloriole, notamment médiatique et universitaire, ou, dans le cas des États-Unis, un visa et une carte verte…
Ce qui renforce le soupçon d’un coup monté américain dans l’affaire actuelle, c’est le « post-scriptum » Oren. Alors que Netanyaou, en vrai homme d’État, et en vrai Israélien et Juif indifférent aux faux honneurs, s’était « excusé » auprès de Biden – comme il s’était « excusé », en 1995, auprès d’un Chirac qui venait d’accumuler les grossièretés diplomatiques - , Hillary Clinton, sans doute sur l’ordre exprès du président, a convoqué l’ambassadeur d’Israël aux États-Unis, Michael Oren, pour lui faire de nouvelles remontrances. Oren est un intellectuel de tout premier plan, historien de la guerre des Six Jours, historien des relations entre les États-Unis et le Proche-Orient, auteur de plusieurs best-sellers : le meilleur avocat qu’Israël puisse avoir, dans les circonstances actuelles, auprès de l’opinion américaine. Donc, du point de vue d’Obama et de son entourage, l’homme à abattre.
Regardons le calendrier. La secrétaire d’État Hillary Clinton doit participer à la conférence annuelle de l’Aipac – le lobby pro-israélien américain – , qui va se tenir du 21 au 23 mars prochain à Washington. Les Juifs américains qui, cédant à de vieux réflexes, à de vieux tropismes, à la panique de la crise financière, aux mauvais conseils de quelques courtisans, ont voté Obama à 77 % en 2008, sont en train de revenir de leurs erreurs. Leur défection entraînerait à coup sûr la défaite des démocrates, déjà en perte de vitesse, aux élections de l’automne prochain et par voie de conséquence la « cartérisation » de l’administration actuelle. D’où, vraisemblablement, la tentative actuelle de créer, de toutes pièces, une « crise » entre l’Amérique et Israël, à propos de logements qui n’existent pas et que le gouvernement israélien n’a même pas envisagé de construire. Et de terroriser moralement une communauté dont le « mantra », l’ultime confession de foi, est qu’il ne saurait y avoir de contradiction entre être un Juif américain, et soutenir l’État juif.
Qui terrorise moralement les Juifs les terrorisera d’une autre façon. Mais le D.ieu d’Israël et de tous les vrais croyants voit, entend, inscrit dans Son Livre, jugera, et exécutera Son jugement.
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