Dans l’excellent « Journal du dimanche » du 21 février, Claude Askolovitch et Pierre-Laurent Mazars interviewent Bernard Kouchner et commencent sur l’actualité autour d’Israël
:
Israël est-il un Etat voyou, qui utilise des passeports de pays amis pour exécuter ses ennemis?
B.K. Nous condamnons
les exécutions ciblées et l’utilisation de faux. Les agents israéliens n’ont pas usurpé l’identité d’un de nos ressortissants, contrairement aux Britanniques, mais ont utilisé un faux
passeport français et un faux nom. Notre condamnation est sans nuance.
Jusqu’où peut aller cette crise entre Européens et Israéliens?
B.K. Ce qui doit faire dépasser cette crise, c’est
l’affirmation du rôle politique de l’Europe, pour imposer, vite, le chemin de la paix et la création d’un Etat palestinien. Recevoir Mahmoud Abbas, le président palestinien, avec qui je
dîne dimanche (21 février), c’est soutenir l’homme qui porte la solution des deux Etats. La question qui se pose, en ce moment, c’est la construction d’une réalité: la France forme des
policiers palestiniens, des entreprises se créent en Cisjordanie… Ensuite, on peut envisager la proclamation rapide d’un Etat palestinien, et sa reconnaissance immédiate par la communauté
internationale, avant même la négociation sur les frontières. Je serais tenté par cela. Je ne suis pas sûr d’étre suivi des pays européens, ni même d’avoir raison.
Mais cette affaire dit-elle quelque chose sur ce que devient Israël?
B.K. Elle dit la nécessité de la paix et d’un Etat
palestinien, immédiatement. Un Israël en paix retrouverait pleinement les valeurs qui l’ont fondé et pour lesquelles nous tenons à sa sécurité et à son existence – pour lesquelles nous
tenons à lui.
Commentaire
- Commençons par les exécutions ciblées, l’une des tartufferies à la mode, un crime réservé à Tsahal. Quelques exemples parmi tant d’autres : elles ont été utilisées par la Résistance pour abattre des ennemis mortels, par la France pour exécuter Ben Barka, Mesrine ou Mohamed Kelkal, par Chirac dans le sinistre carnage exécuté au lance-flammes dans la grotte d’Ouvéa, par les Anglais sous Margaret Thatcher pour couler un navire argentin avec des Exocet ( made in France) (1100 morts) etc. etc. à l’infini. C’est la langue de bois habituelle toujours utile pour salir les Juifs et disculper les « pauvres » Palestiniens kamikazes et autres.
-Mais qu’importe : c’est l’opinion publique à laquelle on jette en pâture tel ou tel événement médiatique qui d’ailleurs est très rentable en matière d’audimat et de chiffre de ventes des
journaux.
- « Notre condamnation est sans nuance » déclare Kouchner: la vôtre aussi; nous sommes quittes. »…
- Pour l’affirmation du rôle politique de l’Europe, pour imposer, vite, le chemin de la paix et la création d’un Etat palestinien ». L’Europe se prend pour le centre du monde et est
donc habilitée à « imposer » – Kouchner dit bien « imposer » – son point de vue. L’éternelle arrogance bien française.
- « Le chemin de la paix » la France a toujours défendu ce chemin vers la paix et depuis des décennies : cette constance est tout à son honneur. Le problème que Kouchner élude,
c’est l’échec continuel et les tragédies où ce chemin là ont conduit. Mais au bout de 40 ans la France a trouvé le truc : à force de persévérer dans l’erreur on va réussir ! Se tromper est
humain, persévérer est diabolique, dit le dicton.
- « La création de l’Etat palestinien » : ce n’est sûrement pas de la faute d’Israël si les Arabes ont refusé cette solution pourtant acceptée par l’Etat hébreu ! Et comment se
fait-il que Kouchner, en toute logique ne demande pas aux Arabes d’accomplir le même pas ? Pourquoi les Arabes ne reconnaissent-ils toujours pas l’Etat d’Israël ? Kouchner n’a toujours pas
compris que le chemin de la paix devait commencer par là ! Il est myope ? Aveugle ? Borné ? Sûrement pas ! La politique politicienne adopte des « idées » à la mode, celles qui
sont « in ». Kouchner est très « in », il n’oublie jamais de manque le dernier train à la mode.
- « Un Etat palestinien sans frontières ». C’est aussi très « mode » ! Surprendre et dire n’importe quoi, pourvu que cela défraye la chronique comme l’a fait Madonna !
Kouchner devrait essayer avec le Tibet, avec Taïwan, par exemple ! Goebbels disait « Plus c’est gros plus ça marche », le neo-parisienne a trouvé plus fort encore : « Plus
c’est bête plus ça marche! »
- « Je ne suis pas sûr d’avoir raison. » Enfin le Kouchner que nous préférons. Il a mille fois raison d’être circonspect : on ne peut pas, en effet, jouer l’avenir des peuples et
des Etats à la roulette. Assez de victimes palestiniennes, assez de victimes juives ! Si l’on parlait de choses sérieuses, possibles, solides, durables. Par exemple en revenir à la
Résolution initiale refusée parles Arabes : la paix par la reconnaissance des uns et des autres dans la paix complète et dans des « frontières sûres et reconnues », donc pas
celles de 1948 qui ne sont qu’une ligne de cessez le feu.
- « Un Israël en paix retrouverait pleinement les valeurs qui l’ont fondé ». Israël les aurait donc perdues ? Peut-être.
Le problème c’est que jusqu’à ce jour aucune de ces valeurs, aussi imparfaites soient-elles, n’ont été adoptées ni par les Palestiniens ni par le Arabes.
par Nessim Cohen-Tanugi
23/02/2010