L’Egypte sera-t-elle un Iran bis ?
Mercredi 9 Fevrier 2011
Par André Nahum sur Judaïques fm
La révolution du jasmin en Tunisie, le soulèvement populaire au Caire, prouvent que les peuples arabes ne veulent plus des
dictatures qui les ont tenus d’une main de fer pendant des decennies, des régimes policiers, de la corruption, du népotisme.
Il n’y a aucune raison de douter de la sincérité des jeunes qui sont à l’origine de ces mouvements et on leur souhaite de tout coeur
qu’une véritable démocratie s’installe un jour à Tunis, au Caire et ailleurs.
Mais, il y a un mais...
Dans aucun de ces pays il n’y a actuellement de forces d’opposition structurées et en état de prendre la relève des
régimes déchus.
Il y a par contre en Egypte une puissante organisation islamiste, fondamentaliste; celle des frères musulmans dont les objectifs n’ont pas varié depuis sa fondation en 1928 par le
grand-père de Tarek Ramadan.
Pour l’heure, ils font patte de velours en attendant leur tour et les Nations occidentales , Etats-Unis en tête ne
doivent pas mesestimer le danger qu’ils représentent, en ne perdant de vue ce qui s’est passé il y a trente ans en Iran.
L’adminiistration américaine va-t-elle répéter avec le président égyptien les erreurs qu’elle a commises alors et qui ont abouti au régime des Ayatollahs ?
Souvenez vous. En 1978 , Jimmy Carter s’est trouvé face en Iran à une situation semblable en tous points à celle
que Barak Obama affronte aujourd’hui en Egypte.
Des manifestations de masses ont eu lieu dans les rues de Téhéran, comme aujourd’hui au Caire, appelant à chasser le Shah qui avait
été l’allié essentiel des USA dans le golfe persique, tout comme aujourd’hui elles demandent à Moubarak de “dégager.”
Et en 2011 comme en 1978, la Maison Blanche, prise au dépourvu, ne savait pas trop s’il fallait soutenir un pouvoir contesté
ou pousser à son remplacement et par qui ?.
A cette époque , plusieurs experts américains et non des moindres , affirmèrent à une administration
hésitante que Khomeyni était quelqu’un avec lequel on pouvait travailler et les Américains lui faisant confiance ont “ pris le Shah par la queue” et l’ont jeté en exil comme un rat mort,
selon l’expression de Dove Gold dans un article du Jerusalem Post.
On connait la suite...
Face aux manifestations de la place Tahrir, il n’eat pas certain que la Maison Blanche ait adopté une ligne de conduite
cohérente.
Un jour on demande le départ immédiat de Moubarak en menaçant de couper les vivres. Et le président américain parle au téléphone à
son homologue égyptien qu’il a chouchouté durant tant d’années, d’une façon particulièrement dure et même insultante.
Et puis on se ravise et on accepte qu‘il reste encore un peu au pouvoir.
On fait confiance à Omar Souleyman que les Etats-Unis connaissent bien et qui jouit chez eux d’un préjugé favorable et
puis on se demande si Mohamed El Baradei ne ferait pas mieux l’affaire, alors qu’on sait très bien qu’il est mis en avant par les frères musulmans pour rassurer les Occidentaux
et qu’ils le renveront par la suite comme le fit Khomeiny avec Mehdi Bazargan.
Barak Obama ferait preuve d’une grande naïveté s’il croit que les frères musulmans ont changé et qu’ils sont maintenant
“modérés”.
Tout cela sème le doute chez ses plus fidèles alliés : l’Arabie séoudite , la Jordanie, les états du golfe qui craignent de se retrouver un peu
seuls dans la région pour contrer l’Iran, et Israël qui peut s’interroger aujourd’hui sur la valeur des garanties américaines.
Rien n’est encore joué. Nul ne peut prophétiser avec certitude ce qui va se passer après la place Tahrir, mais laisser la mouvance
intégriste détourner à son profit ce formidable mouvement populaire, c’est accepter de voir demain le Moyen-Orient tout entier doté de régimes à l’Iranienne et
Israël, cerné de toutes parts par un islamisme djihadiste dont la haine de l’ Occident et de l’état juif serait le ciment.
Qui veut de cela ?